Mémorial de la Shoah

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Raphaël Esrail

Raphaël Esrail n’est plus. Le Cercil perd un grand ami, qui fut toujours présent à ses côtés. Résistant et déporté, inlassable témoin, il a consacré toute sa vie à transmettre et faire vivre cette mémoire, se projetant vers le futur afin, comme il l’écrivait lui-même, de dessiner « au fil des engagements, des textes, des témoignages, une espérance, celle de l’émergence d’un monde meilleur, plus juste »

Notre tristesse est profonde. L’équipe du Cercil.

Né le 10 mai 1925 à Magnésie (Turquie) dans une famille juive qui émigre en France l’année suivante, membre de la résistance juive à Lyon pour la confection de faux-papiers, arrêté puis interné au camp de Drancy, il est déporté à Auschwitz-Birkenau par le convoi n°67 du 3 février 1944. Il survit aux conditions inhumaines du travail forcé qu’impose la “solution finale”, il affronte les “marches de la mort” à partir du 18 janvier 1945. Libéré par les troupes américaines le 25 avril, il retrouve celle qui deviendra sa femme, elle aussi déportée à Auschwitz-Birkenau et survivante, témoignant pour elle et pour ceux qui ne sont plus dans son bel ouvrage, L’espérance d’un baiser.

Cette profonde et juste autobiographie publiée en 2017 (Robert Laffont) éclaire l’oeuvre de connaissance et de transmission que Raphaël Esrail réalise à l’Union des Déportés d’Auschwitz. Il en devient le secrétaire général en 1986, puis le président en 2008, y poursuivant une mission de savoir et de résilience que les survivants se sont donnée, en mémoire de tous leurs camarades disparus et pour l’éducation des nouvelles générations de France et d’Europe.

Sous sa présidence, avec les grandes compétences humaines qu’il sait mobiliser, l’engagement de l’Union des Déportés d’Auschwitz acquiert une force et un rayonnement exceptionnels, dans le recueil de la mémoire des témoins de la Shoah, dans sa valorisation par la conservation et la recherche, dans l’action éducative et pédagogique à laquelle se voue l’institution. Le bilan de son oeuvre est remarquable, décidant de l’avenir de l’UDA et de la poursuite de ses activités imaginées et assumées par lui, particulièrement ces dernières années alors que décèdent les anciens déportés, ses camarades. Infatigable témoin, président visionnaire, personnalité hors du commun, Raphaël Esrail n’est plus mais son œuvre demeure et restera vivante. Sa présence nous entoure de sa bienveillance et de son intelligence, elle nous commande d’agir en suivant ses traces. Il avait compris dès l’origine que seule l’humanité retrouvée et reconstruite ensemble, par l’éducation, par la connaissance, par la paix, pouvait repousser l’inhumanité extrême qu’il avait affrontée au centre du génocide des Juifs d’Europe.